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Du fait de sa dualité matérielle - à la fois défini par le signal inscrit sur
le
support et par la technique et le dispositif de projection - et aussi des multiples attributs
nécessaires pour le décrire, le critère de
masses spatiale est difficile à cerner. |
Définition |
Par ailleurs : |
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Rappels : la localisation |
Puisque le critère de masse spatiale dépend en grande partie de la position des projecteurs sonores et de celle de l'auditeur (en projection directe), il est impossible d'aborder le sujet sans un petit préambule sur la localisation auditive. Sur
le plan de la perception auditive spatiale, on sait que notre cerveau
analyse les différences entre ce qui parvient à nos deux oreilles
selon les trois principes suivants (pour faire simple) : L'analyse de la distance de la source résulte quant à elle presque exclusivement de la nature spectrale du son, empreinte spatiale qui combine les multiples rélexions, diffractions, absorptions du lieu, et qui fait que plus une source sonore est éloignée, plus l'intensité du son perçu est affaiblie, est appauvrie en composantes aigues et est éventuellement "brouillé" par des réflexions sur des objets. Cette analyse est d'ordre cognitive, et n'est possible que par référence à l'expérience qu'à acquise celui qui écoute et/ou par comparaison entre plusieurs sons simultanés ou consécutifs. La précision de l'analyse perceptive, autrement dit les chances qu'elle coïncide
avec la réalité acoustique, dépend fortement : |
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Précautions |
À la lecture de la liste des variables qui influencent la perception
spatiale auditive, on peut se demander s'il est bien raisonnable
de penser pouvoir composer et reproduire des objets basés sur
elle ? Le critère de masse spatiale, bien qu'il soit effectivement assez fragile (il suffit de placer les enceintes dans une position différente ou que l'auditeur change de place pour que ses valeurs soient différentes, du point de vue du son et/ou du point de vue de l'auditeur) n'en est pas moins totalement maîtrisable ; une vingtaine d'années de production d'œuvres multiphoniques est là pour le rappeler... Voir également la section consacrée au cas des projections simulées et des masses-empreintes pour d'éventuelles applications à d'autres types de rapports entre l'espace composé et l'espace projeté. |
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L'importance de "l'éducation" |
Le critère de masse spatiale est complexe, et les compositeurs
on la maligne habitude de donner à entendre des mélanges de sons
plutôt que de les laisser simplement s'épanouir un à un, de manière à laisser à
l'auditeur tout le temps nécessaire à leur appréciation... Que l'écoute des œuvres acousmatiques en général puisse bénéficier d'un certain entraînement auditif est évident. Il se passe bien sûr la même chose en musique instrumentale ou pour d'autres arts, mais le sens de beaucoup d'œuvres acousmatiques se situe dans des caractéristiques du son qui échappent souvent à l'écoute ordinaire, y compris (ou même "surtout" ?) musicale. Je vous laisse relire la citation du texte de Michel Chion que j'ai placée en introduction du site. Avec l'intégration et la composition d'un "nouveau" critère (je parle là bien sûr des œuvres conçues pour les projections publiques sur des dispositifs multiphoniques ou des réalisations pentaphoniques domestiques), de nouveaux aspects du son sont investis de sens compositionnel. C'est la possibilité pour l'acousmate d'étendre sa création à des territoires qui sinon sont dévolus à de la "décoration" plus ou moins bien adaptée à la composition, et c'est aussi la possibilité pour l'auditeur de pouvoir apprécier d'autres choses dans ce qui lui est proposé, et pour cela, peut-être, de devoir aiguiser son écoute encore plus. Ce n'est pas si évident. Pour "éduquer" l'écoute, rien ne vaut
la ré-écoute. |
Contrairement au critère de masse (spectrale) définit par Schaeffer, celui
de masse spatiale s'inscrit dans un espace à trois dimensions (au lieu d'une
: les fréquences),
ce qui complique singulièrement sa description ! |
Que décrire ? |
Décrire représente avant tout un moyen d'investigation, de connaissance, dont le but final
peut être
la composition ou l'analyse, mais qui pour pouvoir s'effectuer doit
également être basé sur la composition et l'analyse. But et moyen
tout à la fois. La difficulté majeure inhérente à toute description
consiste à définir quels
sont les aspects les plus pertinents, ceux qui émergent principalement
au niveau de la perception, sans tomber dans le piège du réductionnisme
(comme celui qui ferait croire qu'un son n'est qu'une hauteur !). À cause de la complexité des rapports entre
masse-canal et masse entendue, l'approche Schaefferienne qui consiste
à faire
d'abord confiance aux oreilles nécessite souvent ici d'être épaulée
par des représentations visuelles. |
Les quatre attributs |
La nécessité de trouver une terminologie qui
reste simple mais qui soit adaptée
au domaine spatial et qui soit si possible dépourvue d'ambiguité
n'est pas une chose facile ! Plutôt que de faire une liste de "types"
de masses spatiales, j'ai rassemblé sous la forme d'attributs
les différents aspects nécessaires à leur description. Les termes que je propose ont déjà été renommés, réorganisés
ces dernières années, et il est vraissemblable
qu'ils le seront encore... Ceci donnerait : |
La plupart de
ces attributs, même s'ils n'ont pas été formulés
de cette manière, sont traités depuis longtemps par les acousmates
qui ajoutent un niveau d'espace aux œuvres pocophoniques en concert,
en agissant par exemple sur les potentiomètres de la "console de diffusion". |
La Masse-canal
La masse spatiale telle que définie en projection directe n'a
de sens que part rapport au support sur lequel les informations ou le signal
est stocké, et au dispositif de projection utilisé.
La masse-canal est liée à la
masse spatiale d'un objet sonore par le nombre de canaux
du support et du dispositif de projection que requiert cet objet sonore pour exister.
|
Principe et précautions |
On voit bien que la masse-canal ne nous renseigne pas sur l'aspect sonore de la masse spatiale - les attributs de masse - mais uniquement sur le nombre de canaux nécessaires à sa (re)production. Par exemple, avec un minimum d'expérience en projection sonore,
on sait que si le rôle de l'espace extrinsèque n'est pas
trop important, et si les autres critères de l'objet le permettent,
seule la masse apparente de l'objet rouge
correspondra à la masse-canal. On peut parler dans ce cas
de masse coïncidente. |
Cas particulier Plusieurs attributs n'apparaissent que lorsque
la masse-canal est supérieure ou égale à 2. De nombreux outils qui permettent de générer et contrôler
des profils de masses ("mouvements spatiaux") considèrent les objets comme réduits à des "points" ("sources ponctuelles").
En réalité, ils ne sont ponctuels du point de vue de la masse
spatiale que lorsqu'ils conservent une masse-canal de
1 (masse coïncidente), en espace cloisonné ou
dans la réalisation de profils scalaires. |
L'aire |
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L'idée qu'un son puisse posséder un certaine étendue dans l'espace semble
correspondre à notre expérience commune.
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Dans le domaine qui nous intéresse des sons produits par les haut-parleurs, l'étendue d'un son dans l'espace possède généralement une toute autre origine et donc signification, même si le rôle du milieu (l'espace extrinsèque) peut bien sûr interférer et la transformer également (je rappelle que l'on suppose dans toute cette étude des attributs de masse spatiale que le rôle du milieu est considéré comme négligeable ou connu). L'aire
représente la zone délimitée par les points les plus éloignés du
dispositif de projection qui constituent la masse-canal
de l'objet sonore. Dans la terminologie Schaefferienne
le terme utilisé serait plutôt celui de "calibre" ou "d'écart",
mais je me suis fixé sur celui-ci qui me semble plus approprié. |
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Sur les schémas ci-contre, les deux objets représentés en rouge et en bleu possèdent la même masse-canal (4 canaux), à peu près la même forme, mais une aire différente. On peut noter que l'augmentation de l'aire a pour effet secondaire de diminuer la résolution si on n'augmente pas conjointement la masse-canal, en fonction bien sûr de ce qui est permis par le dispositif de projection. Comment parler de l'aire ? En terme de longueur métrique ?
En pourcentage de la surface ou du volume occupé par le dispositif
? Du point de vue du dispositif
de projection, indiquer le pourcentage pour chaque dimension
me semble être cohérent et efficace. En effet, puisque le dispositif
représente
l'espace de projection total de l'œuvre, ce qui compte dans une
optique de reproduction ce sont les positions relatives des projecteurs. Le point de vue de l'auditeur quant à lui n'est
possible que pour les situations où sa position et son orientation
sont connues, soit pour les dispositifs de concerts ou de séances
traditionnels ainsi que pour les dispositifs domestiques. Dans les deux
schémas précédents, du point de vue du dispositif, la différence entre l'objet rouge et l'objet
bleu est avant tout une différence
quantitative : l'aire rouge est plus faible que l'aire
bleue. Mais du point de vue de l'auditeur, la différence est principalement
"qualitative" : l'objet rouge se situe devant lui, il
est "extérieur" à lui, l'auditeur "regarde" le
son,
alors que l'objet bleu l'entoure, l'auditeur se situe "à l'intérieur"
du son. |
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Le siteC'est l'attribut de la masse spatiale qui semble a priori le plus facile à définir, et c'est même souvent le
seul qui soit pris en compte lorsqu'on parle de "spatialisation".
Et pourtant ! |
Masses coïncidentes et sites fantômes |
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Sur le plan de la perception autant que pour la réalisation,
l'aire et le site sont toujours étroitement liés. Dans les techniques de "spatialisation" les plus simples (c'est à dire celles qui permettent de traiter quelques attributs de la masse spatiale) comme celles qui sont basées sur les modules "surround" de nos logiciels multipistes, la présentation visuelle des outils permet de situer sur les différents canaux d'un dispositif de projection qui en comportant le plus souvent de 5 à 8, un objet dont la masse-canal initiale est généralement égale à 1 ou 2 (mono ou stéréo). Lorsque
l'aire de la nouvelle masse est égale à 1 (en nombre de canaux), l'objet est projeté par un seul canal /
enceinte. C'est ce qui est représenté sur les trois premières vues
: le site est tour à tour égal aux canaux Avant-Gauche,
Centre et Avant-Droit (voir sur la page consacrée à l'aire
la description des points de vue), la masse spatiale
est toute entière supportée et définie à chaque fois par un seul
canal / point de projection, le site
coïncide avec la masse-canal.
Par contre, si l'on regarde (et écoute,
j'espère bientôt...) la quatrième vue, la masse spatiale
y est répartie sur deux canaux : la masse-canal est égale à 2
et l'aire est délimitée par les canaux Centre et Avant-Droit.
Le
site apparent, tout du moins si l'auditeur est placé au point
focal du dispositif (l'endroit où convergent les lignes), se situe juste entre le canal central et
l'avant-droit (lorsque la densité est égale sur les deux canaux
et l'organisation homogènbe, n'oublions pas). La perception spatialement floue du site dans le quatrième cas lui vaut le nom de "fantôme". Contrairement à un site coïncident, un site fantôme possède toujours une masse-canal égale ou supérieure à 2. Il n'y a pas de limite à l'aire d'un site fantôme (la technique VBAP utilise deux ou trois canaux), tout ce qu'on peut constater, c'est que plus l'aire est importante plus la perception du site devient floue et tend à disparaître en tant que telle... |
Le site, l'aire et la résolution |
De la combinaison de ces trois attributs dépendent les possibilités de localisation du site. |
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Sites relatifs ou absolus |
Dans le domaine des masses spectrales simples (son tonique, son pur), on sait que les auditeurs peuvent percevoir les hauteurs d'une manière "absolue" (« c'est un ré# 4 un peu bas...»), d'une manière relative (« il y a un intervalle de tierce mineure entre deux hauteurs successives...»), ou les percevoir mais ne pas savoir les analyser (le cas de l'auditeur lambda...). La question peut se
poser aussi pour l'attribut de site, mais dans des termes différents puisque la référence
"absolue" ne peut pas être physique (la lattitude et la
longitude ?!) mais forcément arbitraire. Selon la formule de présentation considérée
et le dispositif de projection, l'une
de ces deux conceptions pourra être dominante : par exemple celle
du site relatif en pentaphonie domestique et celle du site
absolu par rapport au lieu dans le cas d'une installation. Comment décrire le site ? |
Comme pour l'attribut de hauteur du critère
de masse spectrale (si on transpose cette terminologie) dont
l'émergence dépend de la combinaison de sa forme (le
degré d'harmonicité : sons toniques), de sa densité (les
harmoniques inférieurs doivent être plus intenses que les harmoniques
supérieurs), de son aire (une masse étroite, réduite à une
seule fréquence), l'attribut de site de la masse spatiale
apparait en tant que tel à la perception lorsque : |
Le cas des "distances projetées" |
Bref, sans passer sous silence d'éventuelles contraintes économiques (des canaux en plus ?), ou encore les limites techniques imposées par certains lieux (dans le cas de l'écoute domestique il est difficile, et d'ailleurs inutile, de placer des enceintes à différentes distances de l'auditeur), il serait dommage de ne pas jouer sur les différences de distances des plans de projection. On pourra me rétorquer que les dimensions des studios où
s'effectue la composition permettent rarement d'expérimenter
les projections distantes réelles. Des différences de distance entre les sites de plusieurs objets, ou des profils de sites qui se traduisent en variations de la distance projetée n'ont évidemment de sens que du point de vue de l'auditeur. Sur le schéma ci-contre, la différence entre les sites de l'objet vert et de l'objet bleu (masse-canal = 1) est perçue comme différence de distance pour l'auditeur symbolisé par la croix bleue, mais comme différence angulaire frontale pour celui qui correspond à la croix mauve. Il y a deux points de vue de l'auditeur mais un seul point de vue du dispositif. |
Valeurs des sites |
Percevoir un son comme se situant devant, derrière, au-dessus ou
au-dessous de soi n'est pas équivalent sur le plan perceptif ni anodin
sur le plan "psychique". La même dualité d'analyse existe pour tous les
critères sonores : un son modifié par transposition d'une tierce
vers le grave est-il un autre son ou le même à
une autre hauteur ? L'acousmate
formé au Traité des objets musicaux penchera pour la première solution,
le musicien (instrumental) choisira certainement la seconde. Pour en revenir à notre site, les différents
points de projection ne sont pas non plus équivalents par rapport
à l'auditeur, et introduisent
également des changements dans les rapports entre critères, peut-être
moins évidents que pour la hauteur (ou bien est-ce parce qu'on ne
sait pas les reconnaîtres ?) mais néanmoins bien réels. Et puis, et c'est peut-être le plus important,
notre corps possède une orientation (devant / derrière) et une
symétrie (droite / gauche). La plupart de nos organes des sens et
notamment la vue sont orientés devant nous. Comme
pour son équivalent dans le domaine de la masse spectrale
- la hauteur -, le choix de tel ou tel site correspond à
la fois à une valeur "purement sonore" et à un sens qu'on
y attache. |
La résolution
La résolution
peut être décrite comme le degré de précision de
la masse spatiale, influençant la perception de l'aire,
la localisation du site, le rendu de la forme, ou la finesse de
l'organisation.
|
La résolution de la masse spatiale est directement dépendante de celle du dispositif de projection. Un exemple du rôle de la résolution peut
être donné en comparant le plan frontal dans les trois dispositifs
suivants : stéréo (masse-canal = 2), 5.1 (masse-canal =
3) et 7.1 en SDDS (masse-canal = 5, voir les formats domestiques). |
La résolution est surtout importante
pour des dispositifs de projection où l'auditeur est très proche des points
de projection et/ou lorsque l'acoustique est très peu réverbérante.
|
La densitéCet attribut échappe souvent en tant que tel aux outils de "spatialisation" qui se focalisent sur des "points" ou des "trajectoires", alors que c'est un des éléments essentiels (voir le seul !) de toute intervention manuelle lors des projections interprétées. Dans tous les cas, il constitue la base de tout travail un peu subtile sur les masses spatiales.
On peut le décrire comme la répartition de l'énergie de la masse
spatiale sur les différents canaux qui la constitue (masse-canal supérieure
ou égale à 2). |
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On a ici, représenté en rouge, un objet de masse-canal 4, où la largeur du disque coloré indique très grossièrement la répartition des intensités. Si l'organisation de la masse est homogène,
alors la masse apparente risque d'être un site plus ou moins
flou centré sur le barycentre des intensités, si l'auditeur est placé à égale
distance des quatre enceintes, ou décalé s'il est plus proche de
certains points de projection. Par contre, si l'organisation n'est pas homogène, les différences de densité s'apparentent plus à l'attribut de forme que de site... |
La simplicité apparente de l'attribut de densité
n'a d'égale que celle de l'intensité des partiels dans le domaine
de la masse spectrale. Mais on ne serait guère avancé, car si c'est juste d'un point de vue physique cela ne correspond pas à notre échelle d'observation où notre système nerveux préfère opérer par catégorisation de macro-propriétés... comme la hauteur ou le site de la masse spatiale. L'attribut de densité est à la fois omniprésent
puisque toute masse pourrait se définir uniquement par ses valeurs,
et en même temps difficile à observer car fortement dépendant de
la position de l'auditeur et généralement associé aux variations
de masse, qu'elles soient spectrale ou spatiales. De plus il
interfère forcément avec les variations dynamiques de l'objet... |
La formeC'est certainement l'aspect le plus difficile à appréhender, car il est tributaire des autre critères du son, de la place de l'auditeur, et nécessite de pouvoir "manipuler" des masses multiphoniques, chose encore mal aisée il n'y a pas si longtemps.
On peut définir la forme comme la
manière dont sont géométriquement répartis les différents canaux sur les points de projection du dispositif. |
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La perception et la représentation
mentale de la forme de la masse
spatiale dépend principalement : Sur les trois schémas ci-contre, on peut voir trois objets de masse-canal égale à 6, dont la forme est différente. L'aire l'est également, mais ce n'est certainement pas l'aspect dominant, et la place de l'auditeur et son éventuelle mobilité sont déterminants pour l'appréciation de la forme. Si la latéralisation du site de l'objet en rouge peut être à peu près également perçue selon les points d'observation, son aire et sa forme "en V" ne pourront être véritablement appréciées que si l'auditeur se situe à gauche ("au-dessous" de l'objet) ou à droite ("en face") de la vue. Pour l'objet en vert, la partie de la masse projetée par l'enceinte en haut au centre risque de ne pas être perçues si l'auditeur se situe au-dessous mais uniquement s'il se situe à une extrémité du lieu. L'aspect assez compact de l'aire rend la perception de la forme assez difficile, à moins que l'organisation ne la favorise spécialement. Compte tenu de son aire et de l'aspect symétrique de sa forme, l'objet en bleu sera à peu près correctement perçu dans tous les cas. La distance qui existe entre les points qui constituent sa masse peut aider à sa caractérisation. J'ai donné précédemment des exemples de masses
spatiales à trois dimensions, est-ce que cela veut dire que la forme
n'est pas possible sur deux dimensions uniquement ? Est-ce un attribut de masse spatiale qui ne peut être utilisé
que dans des installations où l'auditeur
peut se déplacer ? |
Puisque l'attribut de forme fait référence à la possibilité de pouvoir, dans certains cas, se représenter mentalement la "géométrie" de la masse spatiale, il convient de se poser la question de l'identification de certaines formes, du sens et de la valeur éventuelle qui peuvent y être attachés. Il semble exister dans nos schémas mentaux des
archétypes de formes qui soient indépendants du type de perception
concerné, qu'il s'agisse de la vision, du toucher, de la perception
du corps dans l'espace qui l'entoure... et de l'audition. Au-delà de savoir si la forme est perçue
et "correctement" représentée mentalement, on peut se
demander si le fait de "reconnaître" une spirale ou un
carré apporte une valeur particulière à l'objet et à la composition
? En tout cas, qu'il s'agisse de formes-archétypes
ou juste de formes mémorisables et reconnaissables, pour qu'elle puisse être identifiée
en tant que telle, donc mémorisée
et comparée, il faut qu'elle obéisse à trois contraintes : la simplicité,
la symétrie et l'unicité. |
L'organisationC'est l'attribut le moins connu, le plus variable et aussi le plus intéressant
car il rassemble et combine tous les critères de l'objet sonore. |
D'abord, je ne trouve pas ce terme tout à fait pertinent et il est très possible qu'il soit
un jour remplacé par un autre plus approprié... Lorsque la masse-canal est supérieure
ou égale à 2, le signal présent sur les différents canaux peut : La décorélation de l'organisation
peut provenir de captures multi-microphonique,
de traitements multiphoniques (voir les plugins) ou du
jeu avec des instruments qui intègrent
des modules de "synthèse" de masses spatiales,
alors que l'organisation homogène résulte souvent de duplication
du signal associé à des outils de contrôle des masses spatiales
de type "surround" ou des contrôles d'intensités directs
comme en projection interprétée avec une "console de diffusion". |
Types d'organisations |
Il est illusoire et certainement inutile de vouloir
répertorier toutes les manières d'organiser les critères des objets
sonores sur les canaux qui constituent la masse spatiale.
En fait, tout ce que
l'on connait
et que l'on fait depuis longtemps avec des masses stéréophoniques peut être étendu à n'importe
quelle masse multiphonique, avec beaucoup plus de possibilités. |
Le signal de chaque canal possède des caractéristiques
de phase et de spectre plus ou moins différentes. C'est le cas de
toute capture effectuée à l'aide de plusieurs microphones. La différence
immédiate pour les autres attributs est la densification de l'impression
spatiale et l'élargissement du site à la zone recoucerte par l'aire.
C'est la différence entre un signal mono dupliqué sur deux canaux
ou un signal stéréophonique : l'aire est la même mais l'image spatiale
"remplit" la totalité de l'aire au lieu d'être réduite
à un site plus ou moins flou au centre. C'est l'origine même du
terme "stéréophonie" : une image "solide". |
C'est un procédé facile à réaliser et très "payant"
quant au résultat. |
Il peut s'agir de filtrages comme le découpage
en bandes plus ou moins étroites par canal, fixes ou évolutives
(mmmm...), ou plus simplement de décalages de hauteur par transposition
fine, qui se rapprochent dans ce cas de l'exemple précédent, mais
avec un décalage temporel progressif qu'il est également possible
de faire varier dans le temps. |
Des itérations, des amplitudes de grains, des
vitesses d'ondulations différentes selon le canal... c'est toujours
excellent... |
Un mouvement spatial comme une translation de site (voir
Les variations de masses) peut être considéré
selon le contexte comme étant interne à la masse de l'objet. Dans
ce cas, l'organisation présente des variations d'intensités
qui constituent le profil de masse. |
etc... |
Variations de massesAprès avoir consacré tant de temps et de lignes aux tentatives de description du critère de masse spatiale et de tous ses attributs, il pourra sembler étonnant de consacrer cette seule page aux variations du critère, d'autant que pour beaucoup espace sonore est synonyme de mouvement. La raison en est simple : une fois le critère et ses attributs
correctement définits,
les variations de ces attributs sont assez facile à décrire et comparables
aux variations déjà décrites dans le Traité des Objets Musicaux à propos
de la masse spectrale. |
Le profil et l'entretien ? |
Le profil, pour reprendre les termes
Schaefferien, représente une macro-variation temporelle d'un critère
(masse ou dynamique par exemple), alors que l'entretien rend
compte des variations structurelles internes, initialement données par la manière dont le
son a été mis en vibration ("Grain" et "Allure"). Je suis partagé, car si cette double signification peut être pratique, elle peut également prêter à confusion en détournant une fois encore l'écoute du son vers ce qui l'a ou le produit... Mais bon, qu'importent pour l'instant les termes précis
du moment qu'ils permettent de rendre compte de la réalité des sons.
Le qualificatif général de variation
suivi de l'attribut auquel il s'applique m'apparaît finalement comme
étant peut-être plus approprié, au moins dans le cas
des critères d'espace. |
Mouvements ? |
On a l'habitude de dire qu'en son projeté (quelle que soit
la technique) les mouvements
spatiaux des sons que l'auditeur perçoit sont des illusions, des simulations de mouvement,
et on en donne pour preuve que si on déplace un haut-parleur, là
il y a bien mouvement réel de la source. On
l'a vu, si on abandonne cette description technique pour celle des
attributs de masse spatiale, on assiste dans ce cas à des
variations conjointes du site et de l'aire qui
représentent bien un mouvement dans le son, comme un glissé de hauteur
représente un mouvement interne du critère de masse spectrale
qu'il corresponde ou non au déplacement proportionnel d'un doigt
sur une corde ou d'une coulisse emmanchée sur un tube...
Par contre attention : ces mouvements de masse ne sont pas pour
autant assimilables
à des trajectoires dessinées sur un papier ou un écran d'ordinateur
: ce sont des phénomènes complexes, conjuguant tous les aspects
de l'objet sonore. |
Variations des attributs de la masse spatiale |
Ces deux exemples représentent assez bien ces deux tendances
complémentaires : Qu'est ce que cela change ? La manière la plus commune de penser et de réaliser
des "mouvements", dans une écriture "cinétiques", consiste
généralement à faire varier le site de la masse spatiale, avec
une valeur d'aire faible, le plus souvent égale à
1 ou 2 canaux voisins. |
attribut |
variation de l'attribut de masse spatiale |
perception (ce qui varie) |
analogie spectrale |
Site |
translation discrète lorsque la valeur de la masse-canal est conservée ou translation continue lorsqu'elle est obtenue par variations de densité (couplée à la variation de l'aire) |
"saut" ou mouvement discret, peut être assimilable à un "trajet" lorsque l'aire est nulle ou faible ("source ponctuelle") et les points de projection proches |
sons purs ou toniques : variation mélodique scalaire ou glissée |
Aire |
changement des valeurs en XYZ (selon le dispositif de projection) |
élargissement / rétrécissement de l'objet lorsque l'organisation est décorélée, changement de la valeur apparente du site lorsque l'organisation est homogène |
filtrage variable, ... |
Résolution |
subdivision d'une aire ou d'une forme selon les canaux permis par le dispositif de projection, change obligatoirement la valeur de la masse-canal |
modification de la précision du site, de l'aire ou de la forme |
(changement du nombre de notes d'un accord entre la plus grave et la plus aigue) |
Densité |
variation individuelle des valeurs d'intensité des canaux qui constituent l'objet |
valeur apparente du site, de l'aire ou de la forme lorsque l'organisation est homogène, |
sons nodaux, sons cannelés variables, morphing spectral |
Forme |
translation individuelle des points de projection, discrète ou continue, en fonction de ce qui est permis par le dispositif de projection |
déformation plus ou moins perceptible de la figure spatiale représentée mentalement, extrêmement variable selon le type et les valeurs de l'organisation |
(changements d'accords) |
Organisation |
variations des autres critères différentes selon les canaux |
multiple... |
?? |
Types de variations |
On peut lire chez Annette Vande Gorne ou Jacques Lejeune (et d'autres, voir la bibliographie) la description de gestes simples utilisés lors de projections interprétées, sous le terme de "figures d'espace". De nombreuses représentations visuelles de "trajectoires" remplissent également les articles sur les outils de "spatialisation". Mais que sont donc ces "figures" et
ces "trajectoires" ? Dans une optique instrumentale, qui est, ne l'oublions
pas, celle
de la projection interprétée à laquelle se réfèrent Lejeune
et Vande Gorne, il est légitime et certainement utile de répertorier
des variations de masse spatiale correspondant à des actions spatiales
globales à effectuer. Il ne faut en effet pas oublier que celles-ci
ne s'appliquent pas aux objets sonores dont l'œuvre est constituée
mais au mixage pocophonique complet, généralement à deux canaux
: l'œuvre est considérée alors comme un "gros objet". Les logiciels dédiés à la "spatialisation"
s'adressent quant à eux à un travail
de studio sur des objets sonores individuels ou à un jeu instrumental en concert,
généralement sur des sources instrumentales séparées. Enfin, si l'on considère les variations de masse spatiale
comme un critère du son, on peut dégager les types de variations
suivants, pouvant recouper certaines descriptions de "figures
d'espace" ou certaines représentations de "trajectoires". |
type de variation |
description |
variations des critères de masse spatiale |
(constant, invariant) |
(c'est à dire pas de variation du tout...) |
(site, aire, densité, forme, résolution, organisation sont fixes) |
directionnel, vectorisé |
profil linéaire ou non, orienté, enveloppe non bouclée |
site : translation d'un point de projection
à un autre, scalaire, ou continu s'il est couplé à une
variation de l'aire cyclique (mouvement selon une ligne ouverte) |
alternatif |
alternance entre deux valeurs / états ; la variation alternative peut être considérée comme un cas particulier de la variation cyclique qui représente un schéma mental original et caractéristique |
site : saut entre deux positions (le célèbre
"ping-pong" stéréo !), pouvant être perçu selon sa
vitesse comme mouvement ou comme organisation |
cyclique |
profil plus ou moins complexe bouclé, répétition d'une même formule, entretien plus ou moins périodique |
site et aire : mouvement plus ou moins
complexe
qui se répète, tremblement... |
aléatoire ou chaotique |
complexe ou imprévisible |
site : translations en lignes brisées, agitation
autour d'une position moyenne... |
|
Valeurs des |
La question qui se posait pour les archétypes de forme, se retrouve ici avec encore plus d'accuité : certains types de variations de certains attributs possèdent-ils des caractéristiques particulières qui, dans certaines conditions dépendant du dispositif de projection et de la combinaison de tous les critères sonores aboutit à la formation d'images mentales possédant une valeur "spéciale" ? L'idée "d'écriture
spatiale" est souvent basée sur cette supposition un peu
naïve si elle se limite à cela, mais possédant des bases neurologiques
aujourd'hui bien assurées (voir bibliographie). Quelle valeur possède une variation donnée ? Comment sa représentation se situe-t-elle par rapport à la représentation de notre corps, peut-il être porteur de sens et d'affects ? |